Un peu d'histoire...


La Campagne d’Italie

 

 

 

 En 1940, l’Armée Française, défaite, est dispersée et désunie. Ceux qui ont choisi de continuer le combat se regroupent autour du Général de Gaulle pour lutter aux côtés des forces du Commonwealth britannique. Les autres, la grande majorité, décident de demeurer dans la légalité et de servir en France non occupée, en Afrique et au Levant.

Tout d’abord opposés dans de farouches combats au Levant puis sur le littoral du Maroc et d’Oranie, les Français se regroupent et reprennent la lutte contre les troupes italiennes et allemandes déferlant sur la Tunisie.

A Alger, le réarmement de la nouvelle Armée d’Afrique est entrepris sous la direction du Général Giraud. A partir d’avril 1943, le matériel moderne, nécessaire à l’équipement d’un corps expéditionnaire en Europe, arrive par bateau des Etats-Unis. Chars, canons, véhicules, armement, habillement, matériel de transmissions…affluent dans les ports d’Alger, d’Oran et de Casablanca.

En Algérie et au Maroc, transformés en un immense camp d’entraînement, les régiments de spahis, de tirailleurs, de chasseurs et d’artillerie d’Afrique se constituent, manœuvrent et s’initient au combat moderne. Les mauvais souvenirs de la campagne de France sont presque oubliés et chacun ne songe plus qu’aux batailles à livrer pour libérer la Patrie. 

La présence française aux côtés des Américains et des Anglais est cependant discutée. D’une part, dans ce nouveau type d’affrontement très mobile, l’idée d’employer sous un même commandement plusieurs nations rebute les Anglo-Saxons qui doivent déjà s’entendre entre eux. D’autre part, les querelles politiques des chefs militaires français sont mal accueillies : Roosevelt déclare qu’ " il faut bloquer la souveraineté française, il y a trop de candidats. "

Enfin, la France souffre de l’image laissée par la défaite de 1940. Pour les Américains, la première armée du monde est désormais hors course.

Il va donc falloir s’imposer " morceau par morceau, piton par piton " pour obtenir la reconnaissance des Alliés.

Le Général Juin écrit le 25 novembre 1943 : " J’ai le sentiment que nous n’arriverons à faire notre trou ici qu’en usant de doigté et de discrétion. Les Américains ne sont pas des gens qu’on bouscule… Ils redoutent les interférences dans leur jeu et les interventions extérieures qu’ils soupçonnent d’avoir été provoquées. A cet égard, les Français leur paraissent toujours un peu agités et il importe d’abord de gagner leur confiance, surtout avant la bataille. Je m’y efforcerai et cette confiance acquise, notre place s’agrandira d’elle-même. "

 

 

 

Le 15ème groupe d’armées allié, placé sous le commandement du Maréchal Alexander, a pour mission d’aborder l’Italie méridionale en trois points.

Les deux premiers débarquements seront effectués par la VIIIème armée britannique sur les côtes de Calabre, à Reggio et à Tarente, afin de contrôler rapidement les ports de l’Adriatique et les côtes de Foggia.

Un second débarquement, opération principale, à la charge de la Vème armée américaine, aura lieu dans le golfe de Salerne, afin de couper, au sud de Naples, les communications des grandes unités allemandes engagées en Calabre contre la VIIIème armée, de s’emparer de Naples, et de pousser ensuite sur le Volturno. Les plages de Salerne sont à la limite des zones d’action de l’aviation de chasse basée en Sicile.

Après le succès du débarquement de Salerne et la jonction des VIIIème et Vème armées, la progression des forces alliées s’exécute lentement, au rythme prévu par Kesselring. L’objectif stratégique est Rome.

Le 8 novembre, le commandement allié prévoit trois phases :

-1ère phase : rupture du front du Sangro, par la VIIIème armée, pour menacer le flanc gauche de la 10ème armée allemande.

-2ème phase : rupture par la Vème armée à la hauteur de la vallée du Liri, pour atteindre Frosinone et, ultérieurement, Rome.

-3ème phase : opération amphibie à la hauteur de Anzio, en vue de déboucher sur les arrières ennemis à proximité de Rome.

La VIIIème armée britannique commence son offensive dès le 9. Le général Clark commandant la Vème armée envisage une action principale en force en direction de Cassino. L’opération dite " Raincoat " vise à faire tomber les piliers nord et sud de la défense allemande sur cet axe.

Peu avant " Raincoat ", le 10ème C.A. britannique, au sud,et le 6ème C.A. U.S., au nord, doivent lancer des attaques de diversion destinées à tater la défense et attirer les réserves allemandes. L’attaque du 6ème C.A., déclenchée le 29 novembre, ne peut enlever le Pantano, et mord seulement sur les pentes Est. La 34ème Division U.S., épuisée par ce dernier effort, est relevée, à partir du 8 décembre, par la Division d’infanterie marocaine.

Précédée par ses détachements précurseurs, la 2ème D.I.M. débarque, à partir du 22 novembre, à Naples et dans les ports voisins.

Ainsi, le 25 novembre, le Général Juin et son état-major s’installent à Maddaloni, où ils vont préparer l’engagement du Corps Expéditionnaire Français dans la zone de la Vème armée américaine.

Le Général Juin a été reçu en parent pauvre. Aucun officier américain, ni même français, du détachement de liaison, n’est venu l’accueillir sur le terrain. Nos alliés ont, à l’époque, une confiance limitée dans la valeur des troupes françaises, et le général Clark désire les employer seulement en qualité de troupes auxiliaires, mises à la disposition de ses commandants de C.A..

Le Général Juin tient à occuper, pour une question de prestige, un créneau opérationnel, où tout le C.E.F. serait engagé sous pavillon français. Mais il accepte de placer néanmoins la 2ème D.I.M. sous les ordres du général commandant le 6ème C.A. U.S..

Ainsi, cette belle division, en faisant ses preuves au feu, ne manquera pas d’impressionner favorablement le commandement américain et de le guérir de son scepticisme.

 

. Le CEF est mis en place au centre du dispositif Allié en novembre 1943 sur la ligne d’hiver. La campagne d’hiver commence.

Les 25 et 26 janvier 1944, le 4ème Régiment de tirailleurs tunisiens coiffe tous les objectifs assignés. Le 3 février, l’ensemble du massif du Belvédère et la plus grande partie de celui de l’Abate sont tenus. La ligne Gustav est percée par les Français mais l’obstacle de Cassino, devenu un symbole, résiste. Au bout de la première phase de l’engagement des forces françaises d’Italie, les Alliés leur reconnaissent un grand prestige ; outre les gains de terrain et les 1200 prisonniers, le C.E.F. a retenu 17 bataillons allemands sur son front, soit 44% des forces ennemies engagées.

Face à l’échec constant des offensives Alliées, le plan français est accepté par le commandement américain le 24 avril 1944. Le CEF, particulièrement désigné pour le combat en montagne, est alors au complet avec ses quatre divisions et ses goumiers marocains. Il prend en charge tout le front de la vallée du Liri au débouché du Garigliano.

Du Cairo à la mer, 9 divisions, soutenues par 4 autres divisions, vont attaquer le 11 mai, à 23 heures, appuyées par 2000 canons, un front tenu par la valeur approximative de 7 divisions et dont les arrières sont menacés par la tête de pont d’Anzio. Le 13 mai à 15h30, Castelforte est définitivement conquise ; le Monte Magio est pris, San Andrea tombe. Le 18 mai, la 3ème Division d’infanterie algérienne prend contact avec la ligne Hitler ; le corps de montagne tient sous son canon la route Itri-Pico. Les 19 et 20 mai, l’ennemi concentre son effort sur le C.E.F., en vain.

Le Général Juin conclue : " Il est encore trop tôt pour mesurer l’étendue de la défaite allemande. On peut cependant affirmer que les troupes françaises ont surclassé leurs adversaires : mise en place du dispositif d’attaque dans une étroite tête de pont ; audace de l’infanterie enlevant de vive force, en pleine montagne, de très puissantes organisations défensives ; maîtrise des artilleurs toujours en mesure d’appuyer les fantassins malgré la rapidité de la progression et le manque de routes ; allant des éléments blindés poussant avec énergie en toute circonstances. "

L’armée française ouvrira la route de Rome. Le courage de ces troupes a effacé les sinistres souvenirs de 1940.

Le 15 juin 1944, devant les populations acclamant particulièrement les Français, dont le rôle important dans la bataille avait été connu, souligné par les Allemands eux-mêmes, les Généraux Juin et Clark sont côte à côte.

Entre Rome et Florence, toutes les opérations qui sont alors menées le sont avec un soucis constant du patrimoine religieux, intellectuel et moral, rendant encore plus d’éclat à la victoire.

Le 23 juillet 1944, à 00 heure, le Général Juin cède le commandement du secteur opérationnel à la VIIIème armée. Le même jour, à minuit, toutes les formations du C.E.F. passent sous l’autorité du Général de Lattre de Tassigny, commandant l’Armée " B ", dont le PC s’est installé à Naples le 16 juillet. Les grandes unités qui doivent constituer le 2ème échelon des forces de débarquement dans le midi de la France se rassemblent déjà.